Tour du monde en 6 initiatives culturelles et confinées

Alors que nous ressortons progressivement d’une période unique de confinement collectif, les lieux culturels tels que les cinémas, les salles de spectacles, les musées, les théâtres… demeurent toujours fermés. Cela n’a pas empêché les acteurs du secteur culturel de nous offrir un contenu artistique riche tout au long de ces deux derniers mois. Paradoxe inédit : bien que le secteur culturel ait vu l’ensemble de ses établissements fermés, les offres culturelles digitales n’ont jamais été aussi nombreuses, et l’accès à la culture autant facilité. L’art reste un remède indispensable face à l’ennui, l’isolement et l’anxiété provoquée par les perspectives d’une telle crise sanitaire sur notre vie future. Nous avons donc vu naître une multitude d’initiatives culturelles et artistiques à travers le monde, encouragée par la nécessité de garder un contact avec le public, de continuer à exercer sa créativité, ou tout simplement de remédier à l’ennui et d’oublier quelques instants l’isolement forcé. Pendant cette période si particulière, les acteurs du secteur culturel ont redoublé d’ingéniosité pour maintenir un contact avec leur public éloigné.

À défaut d’avoir pu voyager, je vous propose de faire un tour de quelques initiatives artistiques qui ont résonné dans le monde entier et permis à la culture de s’infiltrer chez nous durant le confinement, pour notre plus grand plaisir. Je vous invite à découvrir ou redécouvrir ces quelques exemples d’initiatives lancées par des artistes ou des institutions culturelles, qui ne représentent qu’une infime partie de ce que le monde de l’art a pu nous proposer ces derniers mois.

Peintures et reproductions, Le Getty Museum aux États-Unis

Depuis deux mois, les réseaux sociaux voient fleurir une multitude de reproductions d’œuvres d’arts représentant des tableaux célèbres tels que Les raboteurs de parquet de Gustave Caillebotte ou La laitière de Vermeer. Ce défi ouvert à tous est à l’initiative du Getty Museum de Los Angeles, qui a invité les internautes à reproduire chez eux des œuvres d’art en utilisant des objets du quotidien. Si les reproductions sont plus ou moins ressemblantes, ce défi a permis de mettre à l’épreuve l’imagination et la créativité des participants. Certains musées français comme le musée d’Orsay ont même repris cette idée, et publié sur leurs réseaux sociaux les résultats envoyés par les participants.


Rassemblement à distance de musiciens en Serbie

Le 20 mars 2020, alors que l’Italie a entamé depuis 10 jours un confinement suite à la forte propagation de l’épidémie, l’orchestre du théâtre national serbe a décidé de rendre hommage aux italiens en reprenant l’hymne révolutionnaire italien Bella Ciao.

Suivant la même initiative, les membres de l’orchestre National de France ont repris Le Boléro de Ravel à distance, permettant aux internautes de profiter en ligne de l’œuvre de Maurice Ravel.

Projection d’œuvres de street art au Brésil

L’artiste brésilienne Rafamon, habituée à dessiner ses œuvres géantes et colorées sur les murs de la ville de Rio, a choisi de projeter ses créations depuis chez elle sur le mur situé en face de son immeuble. L’occasion également de diffuser un message d’espoir et de soutien à destination des passants dans un pays où la situation sanitaire s’aggrave de jour en jour. Ces créations sont visibles sur la page Instagram de l’artiste (@rafamon).

© Instagram de Rafamon

#LOPERACHEZSOI avec l’Opéra National de Paris 

Les salles de spectacles et salles de danse demeurent toujours fermées à ce jour. Alors pour pallier le manque de contact avec leur public ou leurs élèves, de nombreux danseurs ont trouvé des alternatives durant le confinement et ont mis à disposition des cours de danse en ligne.

La chorégraphe néo-zélandaise Parris Goebel a fait danser simultanément 69 000 personnes à travers le monde via un live Instagram. Les danseurs américains Janelle Ginestra, Willdabeast et bien d’autres continuent d’alimenter régulièrement la chaine immadance.tv.

En France, les danseurs étoiles de l’Opéra de Paris comme Dorothée Gilbert ou Hugo Marchand ont proposé des cours en direct via des live Instagram. Faciles d’accès, ces cours ont permis de maintenir un contact régulier avec le public, et pour certains danseurs de se garantir une rémunération même sans cours en présentiel. Les internautes devaient parfois payer un abonnement pour avoir accès aux cours en ligne. L’Opéra national de Paris a par ailleurs posté sur sa chaine Youtube une série de vidéos intitulée #LOPERACHEZSOI incluant les vidéos des cours en ligne des danseurs étoiles du Palais Garnier. Les internautes peuvent également y retrouver des interviews de chanteurs lyriques, de danseurs étoiles, de réalisateurs, et des extraits d’opéra chantés ou joués par des artistes confinés.

Stay Art Home avec l’artiste espagnol Pejac

Originaire d’Espagne, Pejac s’inspire de l’espace public et utilise différents procédés comme la peinture ou le collage pour créer des œuvres composites poétiques. Afin de faire perdurer son art durant le confinement, l’artiste espagnol a lancé son propre hashtag #STAYARTHOMEPEJAC pour inviter les internautes à explorer leur créativité en réalisant une œuvre picturale depuis leur foyer. Le concept consistait à utiliser l’extérieur visible depuis leur fenêtre comme support de création et comme source d’inspiration pour y faire évoluer toutes sortes de formes ou de personnages. Chaque participant était ensuite libre de partager sa création sur les réseaux sociaux via le hashtag #STAYARTHOMEPEJAC. Cette campagne artistique a rencontré un certain succès puisque des centaines de créations provenant de plus d’une cinquantaine de pays à travers le monde ont été publiées. Cette initiative démontre de manière poétique la capacité de chacun à pouvoir jouer avec son environnement dans une situation aussi particulière que celle que nous vivons actuellement. 

Une chaîne de solidarité entre artistes en provenance du Royaume-Uni

Avec la fermeture des galeries d’art et le report des foires, vendre des œuvres d’art représente une difficulté supplémentaire pour les artistes et les institutions culturelles. Pour faciliter la vente à distance, l’artiste britannique Matthew Burrows a eu l’idée de développer une campagne intitulée Artist Support Pledge. L’idée est de proposer aux artistes souhaitant vendre une œuvre de publier sur Instagram une photo de leur création accompagnée du hashtag #artistssupportpledge. Le prix de vente de l’œuvre d’art ne doit pas dépasser £200. Si les ventes de l’artiste dépassent £1000, celui-ci s’engage par la suite à investir £200 dans l’achat de l’œuvre d’un autre artiste. Cette initiative a permis d’instaurer une solidarité financière entre artistes et de faire gagner en visibilité certaines créations. Des galeries d’art comme Beers London ont partagé l’initiative à leur communauté virtuelle pour encourager et donner plus de résonnance au projet. 

© Instagram #artistsupportpledge

Cette émergence d’initiatives nées d’un arrêt brutal de l’activité du secteur culturel doit s’appréhender de manière bien plus globale qu’une simple parenthèse créative due à un contexte particulier. Elle donne à réfléchir à la pertinence de certains supports digitaux pour maintenir un contact avec le public, dans un contexte où la digitalisation des modes de consommation tend à profondément modifier notre rapport à la culture. La mise en ligne des contenus, les visites virtuelles, les cours en visioconférence et les réseaux sociaux sont autant d’outils à développer pour proposer une interaction continue avec le public. À l’heure où les établissements redoublent d’efforts pour s’adapter aux contraintes imposées par les mesures de sécurité sanitaire en vue d’accueillir de nouveau du public, ces initiatives ont su démontrer la capacité des acteurs du secteur culturel à trouver des solutions pour proposer du contenu à leur public éloigné.

Sources :

Par Margot Di Bella

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