Black Panther est surement le film Marvel le plus « art et essai », et ce n’est pas un hasard s’il est aussi le plus politique. On pouvait s’attendre sans surprise avec un héros noir à ce que les thèmes d’intégration et de communautarisme soient abordés, mais on peut regretter que cela n’ait pas été fait de manière subtile et que la formule Marvel prenne le dessus.
Après Creed, Ryan Coogler revient donc avec un film qui commence par une séquence d’explication de la mythologie Black Panther puis passe directement à un enfant innocent en train de jouer au basket pendant que son père cherche à vendre des armes dans un quartier de Los Angeles. On sent là tout le tiraillement du réalisateur, qui essaie de faire un film bien différent du traditionnel Marvel, mais se voit tout de même pris en étau par les codes de la maison mère.
Ainsi on retrouve tout ce qui a fait le succès de ces films jusqu’à présent: Petites blagues pour dédramatiser les situations inextricables auxquels est confronté le héros, chemin initiatique pavé de trahisons, gadget high-tech ultra-cool, mort symbolique du héros, réunion à point nommé des « rebelles » pour préparer leur contre-attaque.
Les références sont nombreuses et leur intelligente utilisation peut-être l’un des points les plus réussis du film. On ne peut s’empêcher de penser à James Bond dans la scène de remise des gadgets et la scène du casino, au Roi Lion dans la trahison de l’oncle.
Toutefois, on s’étonnera peut-être de la part de crédit donnée à l’antagoniste. Sur le fond, il a raison: le monde a changé, et il faut s’y adapter. On ne peut pas se retrancher derrière une barrière invisible, ou un mur financé par les Mexicains. Il faut partager ce qu’on a appris avec le monde, permettre à l’autre de d’intégrer dans ce monde cosmopolite.
Ainsi le père est désacralisé. Il ne suffit plus de voir son père apparaître dans des aurores boréales pour savoir quoi faire; il faut remettre en question la parole du père et voir plus loin. On ne peut plus s’appuyer sur un conservatisme qui s’appuie sur des valeurs passées, datées. Pour gouverner un pays, désormais, il faut se tourner vers l’avenir.
On se félicitera des tentatives de Coogler d’aborder une thématique politique, mais on restera déçu qu’il n’ait pas pris plus de liberté. Peut-être que le grand nombre de personnage y est pour quelque chose. On voit bien que s’il développe trois personnages secondaires féminins plutôt bien, il n’a pas le temps de s’attarder sur le meilleur ami du héros, alors que celui-ci a pourtant un rôle pivot dans le film. Le traître manque en effet de motivations réelles pour être crédible.
En définitive, Black Panther réussit facilement à se différencier des autres Marvel, mais il échoue à créer un vrai renouvellement du genre. Le schéma narratif créée pour Iron Man trouve ici ses limites. Alors on préférera attendre le prochain Avengers, avec l’espoir que, quand plus de deux-cent héros se seront affrontés sur le grand écran, il faudra revenir à quelque chose de plus intimiste, de plus original, de plus créatif. Et qu’enfin, la surprise sera au rendez-vous.