Du piano à la bougie

Il y a deux semaines j’ai eu le plaisir d’assister à l’évènement Candelight Chopin à Paris. Récit d’un concept qui dépoussière les codes du concert classique.

Un lieu atypique

Il est 21 heures, et ce vendredi soir on se presse devant la maison des Océans de la rue Saint Jacques, au cœur du Quartier latin. Fondé en 1906 par Albert 1er, Prince de Monaco, l’édifice d’inspiration Renaissance italienne qui renferme les bureaux de l’institut océanographique constitue un écrin privilégié de la recherche sur la protection des milieux marins. À y regarder de plus près, se détachent sur la façade méduses, hippocampes et autres crabes. Pourtant, ce n’est pas pour découvrir les trésors de la biodiversité des abîmes que de nombreux trentenaires viennent ici après-diner grossir la file d’attente dans le froid de l’hiver. A quelques exceptions près, une assistance jeune donc. Bruyants et joyeux, ils ne savent pas vraiment à quoi s’attendre mais ils s’apprêtent à vivre une expérience unique.

Les portes se décident finalement à s’ouvrir. Alors, la foule animée pénètre dans le vestibule, se réchauffe à peine avant de se glisser dans les couloirs, jusqu’à trouver l’entrée du grand amphithéâtre. A l’intérieur, les premiers s’affairent à trouver la meilleure place sur les étroits bancs bleus qui dévalent la pièce. Les plus chanceux arrivent jusqu’en bas, au plus près du parquet. Et ce n’est qu’une fois assis que l’âme singulière du lieu apparaît. Toute habillée de bois et parée de majestueux lustres en cristal, la salle donne à voir des fresques imposantes. Devant, « le Pont de la Princesse Alice » détaille une scène de vie dans navire lors d’une campagne océanographique, et sur le mur du fond un bateau fend la mer à la poursuite d’une baleine.

Un concert intimiste

A présent, les lumières se sont éteintes, le murmure des chuchotements aussi, comme s’ils s’étaient accordés à faire une pause. Les détails du décor de la pièce ne comptent plus, puisque devant, la lueur d’une myriade de bougies posées au sol se reflète dans les contours d’un piano. L’instrument s’impose au milieu d’un parterre d’étoiles et déjà l’atmosphère n’est plus la même. Mais voilà la porte qui s’ouvre et le virtuose qui arrive.

Avec facilité, il aventure ses doigts sur le piano, laissant l’émotion envahir la salle tandis qu’il joue Les Nocturnes 1 et 2, opus 27 de Chopin. L’assistance est envoûtée. Le pianiste s’élance de plus belle pour offrir cette fois une succession de valses, d’humeur plus joyeuses. Puis vient le fameux Nocturne en do dièse mineur, que l’on reconnait dans le film Le Pianiste. A mesure qu’il enchaîne les notes, le temps se suspend. Une heure passera sans que rien ne parvienne à ébranler la douceur du moment.

A la fin seulement, le musicien invitera les spectateurs à filmer sa Sonate numéro 3, Opus 28 pour alimenter leurs réseaux, rompant déjà un peu le charme du concert intimiste. Un dernier Scherzo termine de ravir l’audience. Le débordement d’applaudissements qui s’en suit annonce définitivement la fin du voyage à travers l’univers de Chopin. Tout le monde repart ému, de la musique encore plein les oreilles.

Pour en savoir plus sur les dates de ces concerts à la bougie aux prix très abordables qui ont lieu dans plusieurs villes en France et en Espagne !

Par Louise Dugeai

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