Enfin une place pour les réalisatrices en 2021 ?

Une Palme d’Or pour Julia Ducournau, un Oscar de la meilleure réalisatrice pour Chloé Zhao et un Lion d’Or pour Audrey Diwan, l’année 2021 a particulièrement permis de mettre en avant les femmes réalisatrices. En plus des récompenses, les films réalisés par des femmes sont de plus en plus nombreux à arriver sur grand écran en France.

Selon une étude de LE LAB Femmes de Cinéma de 2021, « il ressort que l’année 2021 semble marquée par une prise de conscience croissante de l’importance des problématiques de genre dans l’industrie cinématographique ». En effet, il y a de plus en plus de femmes réalisatrices, ce qui amène aussi de nouveaux sujets sur les écrans. Par exemple, « l’Évènement », le film d’Audrey Diwan récompensé à la Mostra de Venise, traite avec subtilité du sujet de l’avortement, et apporte un regard novateur et revendicateur sur le sujet. De plus, les rôles des femmes dans les films de réalisatrices sont souvent plus importants et moins au second plan que dans les films réalisés par des hommes.

Pourtant, malgré les progrès constatés en 2O21, les réalisatrices restent extrêmement minoritaires dans le paysage cinématographique. Tout d’abord au niveau des récompenses en festival, les femmes ont souvent été effacées, voire invisibles. Julia Ducournau qui a eu la Palme d’Or pour son film Titane est seulement la deuxième femme ayant reçu cette distinction au festival de Cannes depuis sa création en 1955. Avant elle, la néo-zélandaise Jane Camion partageait la palme d’or avec le cinéaste Chain Kaige pour son film La leçon de piano en 1993. Sur toutes les éditions du festival de Cannes, il n’y a jamais eu plus de quatre femmes en compétition par année, le record de quatre étant atteint en 2021.

Ces inégalités que l’on constate au festival de Cannes se retrouvent dans l’intégralité du milieu du cinéma. Le collectif 50/50 publie des analyses dans le dossier Cinégalités. En France en 2019, 80% des films sont réalisés par des hommes. De plus, sur les quinze films les plus financés, tous ont été réalisés par des hommes. Les réalisateurs ont donc, en plus d’être à l’initiative de la majorité des films, un budget moyen bien plus important que les réalisatrices. Ces chiffres donnés par le collectif 50/50 se confirment dans le Bilan 2020 du CNC : le devis moyen des films d’initiative française réalisés par des femmes est de 2,23M d’euros contre 3,81M d’euros pour les hommes. Les femmes ont donc en moyenne 41,5% de budget en moins pour réaliser leurs films.

Pour revenir à l’année 2021, malgré les récompenses accordées à des femmes, dans le top 10 du box-office en France, aucun film n’a été réalisé par une femme. Pourtant, chaque année, de nombreuses écoles de cinéma comme la Fémis affichent des promotions partiaires. Les inégalités se creusent donc plus tard, lorsqu’il faut trouver des producteurs et des financements.

Les femmes sont pourtant les pionnières du cinéma à Hollywood dans les années 1910, puisqu’elles y ont fondé les premiers studios. Elles sont à l’initiative de la majorité des réalisations entre 1911 et 1925. Mais avec le développement de l’industrie du cinéma moderne et la recherche du profit, les hommes sont devenus largement majoritaires, jusqu’à effacer les femmes qui étaient là avant. Par exemple, un des plus grands noms du cinéma hollywoodien des années 1910 et 1920 est Lois Weber. Sur les 153 films qu’elle a réalisés, seulement seize ont été conservés. Elle a été totalement éclipsée et oubliée dans le monde du cinéma.

Pour réduire ces inégalités, plusieurs organismes mènent des actions. Comme cité plus haut, le collectif 50/50 amorce en 2018 suite au mouvement #MeToo une lutte pour que les films faits par des réalisatrices soient soutenus autant que ceux des hommes, et aient une plus grande visibilité notamment dans les festivals. Ils œuvrent aussi à la sensibilisation du grand public en faisant des études qu’ils publient sur leur site internet. De plus, tous les ans a lieu le Festival du Film de Femmes de Créteil, véritable scène qui permet aux réalisatrices d’avoir une place sur les grands écrans.

Si l’année 2021 a mis en lumière de nouveaux visages du cinéma féminin, le chemin à parcourir reste encore important pour que les réalisatrices bénéficient de la même reconnaissance que les hommes.

Léna Bérard

Sources

https://leseclaireurs.canalplus.com/articles/decouvrir/oscars-2021-avec-deux-femmes-realisatrices-en-lice-signe-t-on-la-fin-du-oscarssomale

https://collectif5050.com/fr/nos-etudes/la-parite-derriere-la-camera

https://www.telerama.fr/television/quand-les-femmes-regnaient-sur-hollywood,142055.php

http://femmesdecinema.org/wp-content/uploads/2021/12/%C3%89tude-2021-FR-5.pdf